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Interview de lauréat pitch Congrès ALLICE - Hugues Defréville, NewHeat
Le 09|11|2021
Publié le 09|11|2021
Lauréat du pitch innovation dans la catégorie Intégration d'energies alternatives lors du Congrès ALLICE 2021
Solaire thermique, récupération et stockage de chaleur : des solutions vertueuses et compétitives pour décarboner l'industriePar Hugues Defréville, Co-fondateur et Président de newHeat |
La chaleur renouvelable accessible : ancrer la décarbonation dans l'économie locale, c'est possible !
ALLICE : Hugues Defréville, vous avez fondé newHeat en 2015, pour fournir de la chaleur renouvelable aux industriels en leur proposant des technologies de solaire thermique et de récupération / stockage de chaleur. Pouvez-vous résumer votre offre ?
Hugues Defréville : Nous attachons une grande attention à bien comprendre les besoins de nos clients pour concevoir et exploiter des centrales de production de chaleur renouvelable parfaitement adaptées à leurs besoins. Nous leur offrons des solutions globales, nous intervenons sur l’intégralité du montage et du financement : nous portons totalement l’investissement, puis nous vendons à nos clients l’énergie produite pour l’injecter dans leurs procédés.
En tant que propriétaire des installations, nous pilotons les démarches administratives nécessaires à l’installation des centrales, nous en assurons bien sûr la maintenance… En revanche, nous ne sommes pas des fournisseurs de technologies, nous nous appuyons sur des partenaires.
ALLICE : A quel type d’industries votre offre s’adresse-t-elle ?
Hugues Defréville : Le principal critère est la température dont a besoin l’industrie : pour nos solutions, celle-ci doit-être inférieure à 100°C. Nous ne sommes aujourd’hui pas en mesure de fournir de la chaleur compétitive à des niveaux températures supérieurs, et donc pour des secteurs comme l’industrie sidérurgique, les cimenteries, les verreries… mais cela laisse un très gros potentiel ! En moyenne, tous secteurs confondus, on estime qu’environ un tiers des sites industriels ont des besoins qui concernent une température inférieure à 100°C. Cela varie selon les secteurs, par exemple, pour l’industrie agroalimentaire, cela représente plus de 50% de ses besoins. Ils sont aussi importants pour la papeterie, les briques de terre cuite, les sites chimiques…
ALLICE : Les démarches pour implanter de nouvelles installations sont souvent compliquées notamment avec les associations de riverains, les enjeux de protection de la biodiversité et des paysages…
Hugues Defréville : Justement, notre démarche est différente de celles des centrales photovoltaïques et ses atouts sont bien compris par les acteurs locaux. Le photovoltaïque occupe de larges surfaces localement mais pour fournir de l’électricité sur des sites qui peuvent être très éloignés, voire non identifiés lorsqu’elle est injectée dans le réseau.
Au contraire, les technologies que nous utilisons nous obligent à être ancrés localement : nous devons nous installer à proximité des usines, car nous produisons de l’eau chaude, avec des capteurs qui sont en fait des tôles noires, de 15m2, qui chauffent au soleil et dans lesquelles circule de l’eau, pour ensuite approvisionner l’usine. Les tuyaux qui conduisent la chaleur peuvent parcourir quelques centaines de mètres seulement, au plus un kilomètre.
Les acteurs locaux voient bien l’intérêt : en décarbonant la production, nos installations permettent de pérenniser une activité industrielle sur leur territoire, donc de garantir des emplois pour l’avenir, puisque les industries fortement émissives seront amenées à décliner. Cela améliore aussi la qualité de l’air de la zone industrielle.
En termes de biodiversité, une étude a été réalisée par le SER, et, si en phase chantier, la faune est troublée comme lors de tous travaux, dans l’ensemble, les champs solaires n’ont pas d’effets négatifs trop importants : ils n’artificialisent pas les sols et ils créent un espace sanctuarisé où certaines espèces peuvent se développer. Enfin, la chaleur produite alimente les sites industriels par des tuyaux enterrés, il n’y a donc pas d’impacts visuels.
La principale difficulté est d’avoir un foncier disponible à proximité du site à alimenter : s’il est situé en zone urbaine dense, il est peu probable que nous puissions le fournir.
ALLICE : Quel modèle économique avez-vous mis en place pour atteindre un niveau suffisant de rentabilité tout en étant compétitif pour vos clients ?
Hugues Defréville : Pour l’industriel, l’investissement est nul ! Nous achetons ou louons les terrains qui conviennent au projet et nous finançons l’ensemble de l’infrastructure. Le client s’engage par contrat à nous acheter la chaleur produite sur une durée de 20 ans à 25 ans selon les projets, à un prix donné. Cette période et ce prix sont calculés pour que le modèle soit rentable pour nous et, pour le client, notre solution est déjà compétitive dès la première année. Avec l’évolution du prix des énergies fossiles, sa compétitivité ne cesse de s’accroître.
Pour les industriels, nous sommes aussi la garantie d’un prix stabilisé sur le long terme. Les seules évolutions de prix que nous répercutons concernent le coût de la main d’œuvre, puisque nous réalisons la maintenance des installations. Ce coût, que nous indexons sur l’inflation, représente 20% du prix total. Les variations sont donc très limitées pour nos clients.
Par ailleurs, vu la tendance actuelle, lorsque nos clients se projettent sur la durée du contrat, qui nous amène à 2040, notre solution répond vraiment à leur double impératif de décarboner leurs procédés en maîtrisant leurs coûts. Et pourtant, il y a encore des progrès à réaliser pour fixer un vrai prix du carbone. Aujourd’hui, nous sommes loin de la trajectoire qui permettrait d’atteindre les objectifs de chaleur renouvelable fixés par la SNBC. Le fonds chaleur et les aides de l’ADEME sont de très bons leviers, mais il n’y a guère aujourd’hui que 4 ou 5 projets par an de grandes centrales solaires thermiques qui sont menés, il faudrait en faire 20 fois plus.
ALLICE : La chaleur est produite lorsque le soleil est abondant. Comment gérez-vous les périodes hivernales ou les nuits quand les sites tournent en continu ?
Hugues Defréville : Nous mettons en place des systèmes de stockage. Sur nos projets actuels, nous sommes en mesure de stocker la chaleur représentant 2 ou 3 jours de production, cela couvre donc largement les nuits. Nous utilisons de grandes cuves de 12 mètres de haut par 10 à 20 mètres de diamètre, typiquement 3 millions de litres, l’équivalent d’une piscine olympique.
Pour absorber les variations saisonnières, nous avons développé de nouvelles offres, et déployons actuellement un premier projet qui proposera une capacité de stockage suffisante. Deux technologies sont exploitables :
- Soit des sondes géothermiques : on chauffe le sol à 100/200 mètres de profondeur à 70 °C pendant l’été, et l’hiver on fait remonter cette chaleur.
- Soit une grande fosse creusée dans le sol, qui peut faire plusieurs centaines de milliers de m3 d’eau chaude que l’on réchauffe à 80 / 90° C, recouverte d’une couche d’isolant sur 1 mètre ou plus. Sur plusieurs mois on garde un très bon rendement, jusqu’à 70%.
Hugues Defréville : Bien sûr, nos contrats prévoient qu’elles soient démontées à l’issue de la période si c’est ce que le client souhaite. C’est aussi un engagement qui doit être pris pour obtenir le permis de construire, il n’est pas possible de laisser une friche. Mais les technologies utilisées sont robustes : après 20 à 25 ans, la centrale est amortie et elle fonctionne encore très bien, on peut continuer l’exploitation, c’est ce que nous recommandons au client.
NDRL : pour être mis en relation avec Hugues Defréville, n’hésitez pas à nous contacter : contact@alliance-allice.com.